L’œuvre

Le retable de « la Descente de Croix » est daté actuellement vers 1520-1525.
La scène du panneau central représente la Déposition. Elle est occupée par neuf personnages : autour du corps du Christ mort, on reconnaît la Vierge soutenue par saint Jean et une sainte femme, une autre sainte femme soutient le corps de Jésus et une troisième prie agenouillée. Aux pieds du Christ, figure Marie Madeleine. Les personnages masculins sont Nicodème (à droite) et Joseph d’Arimathie (le long du bord gauche).
Sous la scène centrale, se situe une prédelle avec cinq représentations traitant de la mise au tombeau jusqu’à la Résurrection.
Au sommet du retable, surmontant l’entablement, un couronnement représente la Résurrection.
Deux pilastres décoratifs encadrent le panneau central.
Le saviez-vous ? ce chef d’œuvre est Classé Monument Historique depuis 1908.
Épisode 1 – Opération dépose
Dans le cadre du plan pluriannuel de restauration des retables des Brea du couvent de Cimiez, la phase d’étude diagnostic de « La Descente de Croix » est lancée.
Comme pour les précédents retables, l’œuvre, une fois délicatement déposée, a été immédiatement transférée dans les locaux du Centre Interdisciplinaire de Conservation et de Restauration du Patrimoine (CICRP) à Marseille.
L’opération de décrochage, est une étape délicate qui a nécessité l’intervention de 3 spécialistes de la dépose de panneaux anciens aux côtés d’un conservateur-restaurateur de support de bois (mobilier er panneaux peints) et d’une conservatrice-restauratrice d’œuvres peintes pour garantir l’intégrité de l’œuvre



Suite au prochain épisode : « Opération diagnostic »
La première étape consistera à traiter l’œuvre par anoxie statique, pour éliminer les insectes nuisibles présents au plus profond du bois.
Ensuite, une série d’investigations par imagerie scientifique (photos en lumière directe, en lumière rasante, sous fluorescence UV, en rayonnement infrarouge, radiographie et réflectographie) aboutira à la constitution d’un dossier scientifique très documenté, permettant de mieux appréhender l’œuvre et de définir les étapes de sa restauration et de sa conservation.
L’attribution à Ludovico Brea, mise en cause par certains spécialistes, fera également l’objet de débat au sein du comité scientifique d’étude des œuvres du peintre. Car si, très certainement, Ludovico Brea a élaboré la composition, l’exécution a pu être confiée à son frère Antoine et à son neveu François.
Après cette première phase d’une durée d’environ un an, le retable de « La Descente de Croix » fera l’objet d’une restauration fondamentale.
Le saviez-vous ?
L’œuvre avait précédemment été restaurée en 1849, en 1936 puis en 1951.
En 2012, à la demande de la Conservation Régionale des Monuments Historiques (CRMH), le retable fut recouvert de papiers protecteurs (facing) afin de prévenir et de consolider des pertes de matières peintes (couche picturale).
Bon à savoir
Pendant son absence, un fac-similé reproduisant l’œuvre sera présentée en lieu et place de l’original ainsi qu’un panneau explicatif.
L’union fait la force
L’étude diagnostic de « La Descente de Croix » des Brea bénéficie du concours de la Direction Régionale des Affaires Culturelles (DRAC PACA), du Centre Interdisciplinaire de Conservation et Restauration du Patrimoine (CICRP), du groupement Amoroso Waldeis et de la Direction des Patrimoines de la Ville de Nice avec son groupe Biens Patrimoniaux Historiques . L’étude diagnostic du retable de « La Descente de Croix » peut être réalisée grâce aux financements conjoints de la Région Sud PACA, de la DRAC PACA et de la Ville de Nice.
Glossaire
Retable : à l’origine, simple meuble de bois ou de pierre placé derrière l’autel. Au Moyen Âge, élément décoratif lié à la fonction religieuse. Aux XVIIe et XVIIIe siècles, le retable prend de l’importance et devient une véritable œuvre d’art.
Prédelle : partie inférieure d’un retable généralement divisée en plusieurs compartiments comprenant des épisodes religieux en relation avec le thème principal.
Panneau central : représentation de la scène à laquelle le retable est dédié. L’iconographie évoque la vie du Christ, de la Vierge et des saints.
Pilastre : ornement en forme de pilier plat de faible relief, encadrant le panneau central.
Entablement : moulure ou saillie formant la corniche du retable. Il prend place, au-dessus du panneau central.
Couronnement : sommet décoratif surplombant le retable.
L’anoxie statique : traitement curatif qui consiste à priver d’oxygène les différents éléments du retable afin d’éliminer les potentiels insectes nuisibles.
Le facing : opération de protection provisoire de la couche picturale par le collage d’un papier non-tissé ou fin (de type papier japon). Cette technique de fixation temporaire évite la perte de matière en cas de soulèvements ou d’écaillage et s’avère indispensable lors de la manipulation de toute œuvre peinte.
Un peu d’histoire
Peinte primitif niçois
Ludovico ou Louis Brea est né à Nice aux alentours de 1450. Son père, Moneto Brea, exerçait le métier de tonnelier dans la rue Barillerie où Louis installera son atelier. En 1462-64 et 1473-75, Moneto fut prieur de la Confrérie de la Miséricorde (Pénitents Noirs), preuve de l’assurance intellectuelle et économique de cette famille originaire de Montalto-Ligure.
On ignore tout de sa formation mais, de 1475 à 1516, Louis Brea fait montre d’une activité intense en réalisant une quarantaine de retables entre Toulon et Gênes. Ne pouvant les produire seul, il en conçoit la composition et des disciples interviennent dans l’exécution, son frère Antoine et son neveu François notamment. Jouissant d’une forte réputation, il est sollicité par le futur pape Jules II en 1490 pour réaliser, avec Vincenzo Foppa, un polyptyque monumental. Il peint également des fresques, mais seules celles de la bibliothèque du couvent des Dominicains de Taggia (1495) ont été conservées.
Influencé par les modèles lombards et flamands, Louis Brea fait évoluer la peinture religieuse régionale du Moyen Âge et ses poncifs vers la Renaissance. Ses œuvres présentent une étonnante finesse dans les détails : plissés, majesté et humanisme des personnages, minutie et précision des paysages.
À la disparition de Louis, probablement victime d’une épidémie de peste vers 1523, et d’Antoine, François hérite de l’atelier Brea et perpétue la tradition familiale jusqu’en 1562.
Brea et le monastère de Cimiez
En 1546, les Bénédictins de l’abbaye de Saint-Pons cèdent la chapelle et leurs terrains de Cimiez aux Franciscains dont le monastère, situé sur l’actuelle place Saint-François du Vieux-Nice, a été saccagé lors du siège des Franco-Turcs trois ans plus tôt.
Les frères mineurs bâtissent un premier cloître surmonté de cellules, font creuser une citerne et réparent l’église où ils placent trois magnifiques retables de Louis Brea sauvés de la destruction du couvent. Ils témoignent de quarante ans d’activité du maître. Avec son iconographie gothique, le triptyque de la « Piéta » entre SS Martin et Catherine est sa première œuvre connue (1475). Datée de 1512 et signée (en latin) Ludovicus Brea, la « Crucifixion » marque une évolution importante dans son art. Il réalise une grande scène centrale sur un fond de paysage très élaboré, en conformité avec l’idéal de la Renaissance. Aux extrémités de la prédelle, figurent les armoiries des commanditaires, les Grimaldi de Beuil, famille très influente du Comté de Nice. Enfin, la « Déposition de Croix » (ou « Descente de Croix ») est constituée d’un panneau unique et d’une prédelle (vers 1520).
Dans les années 1660, l’église est agrandie par un chevet et des chapelles latérales, meublée de stalles en noyer et de l’impressionnant retable doré du maître-autel. Puis, au XVIIIe siècle, sont édifiés le grand cloître extérieur donnant sur le jardin potager et un portique d’entrée. Ce dernier est remplacé, en 1844, par une façade au style troubadour.
Lieux associés
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Jardin du Monastère de Cimiez
1 avenue Bellanda
06100 Nice